Eolmer, fringant bonhomme

Eolmer, fringant bonhomme

1-2 L'ATPFC (Association Touristique du Peuple des Fourmis Civilisés)

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1-2. L'ATPFC (Association Touristique du Peuple des Fourmis Civilisés)


 

  Donc, comme nous pouvions le constater dans les écrits précédents ; Eolmer avait de grandes difficultés, question nourriture.

 

Heureusement, notre ami était rusé (pour un ogre-nain, bien sûr. Ce qui revient à dire d'une vache qu'elle est plus vive que sa voisine, même si elle n'en reste pas moins une vache, m'voyez ?) et il mit donc au point une parade avant de s'en vanter de sa voix bourrue :
— Si j'mange du bois, bah j'chrai du bois ! C'est dur le bois... et ça encaisse bien les coups en plus. Et pis au moins el'Chef il l'interdit pas ça... Le bois !
  Et donc, Eolmer et son intelligence hors pair se mirent à la recherche de quelques succulents bouts de bois. Son choix étant porté sur ceux à la moisissure digne des plus grandes sauces que pouvaient confectionner les cuisiniers les plus honorables de sa tribu. Il se permit même quelques petites folies gastronomiques en y ajoutant plusieurs pincées d'insectes grouillants. Et, une fois cela accompli, Eolmer fit cuire le tout avant de plonger ce met délicieux dans son gosier béant.
— Hmm... Hm ! Ché plutôt costaud, mais chympa !
  Mais, à ce moment précis, alors qu'Eolmer était au comble des plaisirs culinaires, une voix inconnue vint perturber les festivités.
— Scusez ?...
  L'ogre nain (qui, à ce moment même, manqua de déféquer. Mais ne lui dites pas que je vous l'ai dit...) attrapa sa vilaine masse, puis tourna sur lui même en essayant de trouver, vainement, la source de cette minuscule voix. Et, tandis qu'il cherchait tout autour de lui — le popotin tremblant et les articulations instables —, il dit :
— Hoooo hooo, gaffe hoooo, j'chuis fort, j'cogne fort, em cherche pas hein ?! Bweu euuh !
— Et bien, je n'en doute pas Monsieur, dit la petite voix d'un ton poli et décidé à la fois, tout en admirant la force et surtout, le courage, qui émanaient de l'individu. Ou pas. Mais... auriez-vous l'infinie gentillesse de bien vouloir cesser de piétiner notre village ?
— Hein ? Qué village ? demanda l'ogre-nain, tout en vérifiant sous ses pieds. Tention ho ! T'fiches pas de moi, toi ! J'chui un grand guerrier t'sais ?
— Certainement... Mais, voyez-vous, par exemple, la bûche sur laquelle vous vous êtes assis si vulgairement, est en fait un rassemblement de splendides buildings cinq étoiles, monsieur. Tout neuf, qui plus est ! Et, sachez que nos clients ont payé cher pour, justement, éviter tous les tracas des grands axes ! En plus, ça nous a coûté un bras d'essayer de transformer ce village en station touristique... Alors, si vous pouviez vous arrêter de gesticuler, MONSIEUR, je pense que tout le monde en serait ravi !
—  Ho ? Bouil. Ding. Comprends pas.
  Et, en se penchant le plus possible (Eolmer ayant une bedaine plutôt imposante en comparaison avec son petit gabarit, ainsi que quasiment pas de cou et des jambes si courtes que son ventre cachait ses genoux), l'ogre-nain crut enfin voir où se situait l'inconnu. En effet, bien plus bas, il put percevoir quelques mouvements microscopiques tout autour de lui, sans pouvoir dire avec assurance s'il s'agissait de fourmis ou non. Il y avait aussi quelques insignifiantes flammes, les plus petites qu'il n'eût jamais vues. En fait, en tendant bien l'oreille, Eolmer put même entendre ce qui ressemblait à des cris et un brouhaha typique d'une situation de crise dans un environnement miniature.
— Bon, très bien, dit la petite voix d'un air songeur. Patientez, je vous prie. En attendant que nos services d'urgences viennent mettre un terme à ce cauchemar, je vais procéder à une estimation des coûts afin que vous puissiez vous acquitter de votre dette et ainsi, vous en aller au plus vite.
  Cependant, avant que la petite voix n'ait pu finir sa phrase, L'ogre-nain était déjà bien loin. Très loin même, sa massue — presque plus grosse que lui — rebondissant sur sa nuque, tandis qu'il jetait des regards apeurés par-dessus ses épaules bleuâtres.
  Oui, Eolmer, après avoir subi toute une suite de mots exigeants, fuyait. Et, soyons honnêtes, il s'agissait là de sa première réaction censée du jour ; L'ATPFC (L'Association Touristique du Peuple des Fourmis Civilisées) étant une organisation sans pitié quand il était question de finance.

 

 

 

Eolmer, fringant bonhomme

Alexandre HOSTE

Tout droits réservés, 2015



24/06/2015
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